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16 novembre 1978, au large des Açores... Message radio du Manureva, destiné à RMC... « Le bateau marche à merveille, j’ai retrouvé le contact avec Manureva... je le mène plus doucement qu’autrefois et je pense qu’il m’en sait gré... Manureva et moi faisons bonne route... Salut à toute l’équipe... »
En tête de la première édition de la Route du Rhum, Alain Colas, star de la voile française qui force, depuis 1972 et sa victoire dans la Transat anglaise, l’admiration par ses exploits sur toutes les mers du globe vient d’émettre son dernier message radio. Ce jour-là, il entre, avec son trimaran, le Manureva (l’oiseau du voyage en tahitien) de plain pied dans la légende. Pendant plusieurs mois le grand public qui se passionne depuis peu pour les courses en solitaire, va suivre dans l’angoisse les recherches déployées pour retrouver leur trace. En vain. Personne ne saura jamais ce qui est arrivé à «L’oiseau du voyage» bleu et blanc et à son skipper surdoué.
En septembre 1979, après des mois passés à tenter de saisir le moindre fragment d’espoir de retrouver son frère aîné, Jean-François Colas qui a étudié, avec le scientifique naufragé volontaire Alain Bombard, la dérive du bateau et la possibilité de survie de son capitaine grâce à une nutrition à base de plancton, entend une refrain qui lui déchire le coeur : « Où es-tu Manu Manureva.. Portée disparue Manureva. Des jours et des jours tu dérivas, mais jamais jamais tu n’arrivas....»
Durant l’été, Alain Chamfort a enregistré son 3ème album à Los Angeles avec des textes de Serge Gainsbourg dont un est intitulé Adieu California. Chamfort n’apprécie pas les paroles et demande une ré-écriture. Au cours d’un dîner avec Eugène Riguidel et Jane Birkin, Gainsbourg entend parler d’Alain Colas et de Manureva. C’est le déclic et la naissance d’un tube éternel. Si elle souffre alors d’entendre une mélodie qui ravive sa douleur, si l’utilisation du mot Manureva aurait pu faire l’objet d’une action en justice puisqu’il était déposé, la famille Colas sait aujourd’hui que cette chanson, elle aussi mythique, a participé, à sa manière, à préserver la mémoire d’Alain Colas, prodige de la voile trop tôt disparu.
Episode 2
UN JOUR MANUREVA...
La genèse d'une légende
Dans le deuxième épisode de l'émission "Un Jour Manureva..." découvrez le témoignage de Jean-François Colas sur les débuts de son frère entre Clamecy et Sidney.
Né le 16 septembre 1943, Alain Colas, fils d’un artisan faïencier réputé, passe son enfance dans une famille soudée à Clamecy, sous-préfecture de la Nièvre. Dans ce haut-lieu du flottage du bois qui permit à Paris de se chauffer pendant 4 siècles où l’épopée des trains de bois marquent encore le décor, le jeune Alain dévore des livres d’aventures et cultive ses rêves d’évasion et d’héroïsme.
« Enfant, je rêvais d’être assis sur une chaise et de pouvoir poser les pieds à terre... Pour mon septième anniversaire, mon père m’a fabriqué un petit fauteuil et j’ai pu enfin toucher le sol. C’est sans doute le plus beau cadeau qu’il m’a fait. Ce jour-là, j’ai su qu’il fallait réaliser ses rêves. »
Désormais, Alain Colas va rêver sa vie et vivre ses rêves, avec toujours un rêve d’avance, pour ne pas se laisser le temps de trop savourer le fruit de ses succès.
C’est sur l’Yonne, à bord d’un kayak qu’Alain prend pour la première fois contact avec la navigation. Habitué d’un plongeoir à trois niveaux surplombant la rivière où il adore faire le saut de l’ange, il constate un jour que la Mairie a décidé de l’enlever, s’insurge et lance comme un défi au Maire qu’il va créer un club de canoë-kayak.
Nous sommes en 1963. A 19 ans, Alain Colas n’a aucune idée de la manière dont on fabrique une embarcation. Il trouve, à Nevers, une société de fabrication de bateaux, et, en s’appuyant sur une soif de savoir qui ne lui fera jamais défaut, il apprend, étudie puis construit avec ses copains les canoës du club. Une expérience qui nourrira ses constructions futures et prouve déjà son talent d’organisateur et sa capacité à aller au bout de ses idées avec une minutie et une ténacité probablement héritée des gestes sûrs et précis des maîtres faïenciers qui ont bercé son enfance. Le tout sur fond de soif de compétition basée sur une devise claire «démarrer à fond, accélérer tout au long et finir au sprint».
A la même époque, avec deux amis, il rêve de tour du monde et planifie dans un cahier toute l’opération dans les moindres détails en prévoyant, à chaque étape, comment ils peuvent gagner leurs vies, dormir, manger, se déplacer... Le projet n’aboutira pas, mais l’appel de l’aventure a déjà trouvé preneur.
Il veut réussir par lui-même, se tracer un destin de grand voyageur exemplaire et exotique à l’instar de son grand-père maternel. Comme Jean-François, son frère cadet avec lequel il noue une vraie complicité et qui sera le témoin et, souvent, le partenaire de ses aventures maritimes, il entend les exploits de cet explorateur fantasque et solitaire, très proche de Galliéni qui devint interprète d’une reine de Madagascar et qui, un jour, déçu de ne recevoir qu’une médaille d’argent, et estimant avoir droit à l’or, accrocha la médaille au collier de son chien !
Les Colas, artisans de la faïence
Quand Alain Colas disait, son éternel brin de malice au fond des yeux : « C’est à coup de faïence que j’ai été élevé... » il rendait hommage au savoir-faire de son père, Roger Colas qui perpétua la tradition de la faïence de Clamecy lancée en 1790 par Fidèle Nolet et légua à sa famille son esprit d’entreprise, sa créativité et son souci d’aller au bout des choses, en se préoccupant du moindre détail. Roger Colas fut aussi l’un des rares artisans à réaliser des lustres complets en faïence, des objets prestigieux que Jean-François Colas aime toujours à travailler dans la Maison familiale que dirige aujourd’hui ses enfants Elodie et Alexandre.
Cette partie du site www.ericleseney.com dédié à Alain Colas a été créé et écrit par Eric Le Seney et mis en page par Stéphanie Wulle.
Textes et vidéos ©Eric Le Seney Sewels production Photos Alain Colas et archives vidéos ©Famille Colas Film "Alain Colas, rêves d'océan" a été coproduit par injam Productions et l'INA
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